Développer nos capacités de mémorisation

Développer nos capacités de mémorisation

Nous vous invitons à écouter l’émission  » Tout comprendre »  de FRANCE INFO du vendredi 29 août 2014, disponible jusqu’en 2017.

Quand elle fonctionne sans accroc, on ne pense pas à elle. C’est au moment où elle fait défaut que l’on comprend à quel point elle est essentielle… La mémoire !

Pourquoi la mémoire est-elle essentielle ? À quel âge forme-t-on ses premiers souvenirs ? Peut-on avoir confiance en sa mémoire ? La mémoire a t-elle des limites ? Les animaux ont-ils de la mémoire ?

Interview d’Alain Sotto, psychopédagogue, spécialisé en neuro pédagogie et en psychologie de la connaissance, et auteur avec Varinia Oberto du livre Une mémoire pour la vie (Ixelles Editions).

Histoires d’enfants et d’école

Histoires d’enfants et d’école

Quelques histoires d’enfants et d’école.

Scarlett ou la peur des fautes

Scarlett est en CE1. Petite fille très angoissée par l’école. Par ses résultats dont elle n’est jamais contente. Pourtant elle est une bonne élève, mais chaque erreur est vécue comme un drame. Elle ne voit pas le « bien » ou le « juste » qui notent les exercices, elle ne remarque que le mot barré ou souligné en rouge par la maîtresse. Cela jusqu’au jour où on lui dit : On va à l’école parce qu’on a des choses à apprendre, et il est normal de faire des erreurs. Aussi étonnant que cela puisse paraître, Scarlett ne le savait pas. Plus étonnant encore, nombreux sont les petits écoliers à être dans ce cas. Quand un enfant sait que dans tout parcours scolaire, on ne progresse pas en ligne droite, que l’on stagne, régresse, que l’on fait des retours en arrière, le voilà rassuré.

June ou la difficulté de l’aide parentale

June entre au CP. Aucune difficulté n’a été relevée en maternelle. Et l’apprentissage de la lecture en septembre ne lui pose pas de problème, puisqu’il s’agit au cours du premier mois de s’y initier de façon globale. Mais bientôt June a des difficultés avec un phonème, le ou. June bute dès qu’elle doit déchiffrer un mot qui comporte le son ou. « o et u, ça fait quoi ? demande chaque soir la maman. June reste silencieuse et la maman de s’énerver et de hausser la voix, o et u, ça fait ou, ça fait ou » June poursuit tant bien que mal l’apprentissage de la lecture, un peu plus anxieuse chaque soir à la pensée de ce ou qu’elle connaît, mais qu’elle ne parvient pas à sortir au moment décisif. Sa sœur, qui fait ses devoirs dans la chambre voisine, tétanisée par cette scène quasi journalière, est stressée elle aussi à l’idée qu’elle puisse un jour ne pas savoir quelque chose et provoquer la colère de sa mère : or elle a fait un excellent primaire et commence la sixième en bonne élève. Les deux sœurs ont des difficultés à terminer leur année de façon satisfaisante. Et il faut enfin que la mère, incapable de maîtriser ses colères, cesse de travailler avec ses filles pour qu’elles reprennent confiance en elles et poursuivent leurs études de façon très correcte. Et sans plus d’angoisse.

Louis ou l’autonomie

Louis est en cinquième. Enfant unique de parents divorcés, il est élevé par sa mère. Celle-ci lui a toujours consacré beaucoup de son temps quand elle rentre du bureau. Temps passé principalement à la table de travail. Leçons, vocabulaire anglais, règles de grammaire, exercices de maths, mais aussi écriture, tenue de ses cahiers, rien n’est oublié. Le seul problème est que Louis n’a pas appris à travailler seul, que les résultats de ses contrôles n’ont jamais été à la hauteur des devoirs maison et qu’il a passé d’une classe à l’autre toujours de justesse. A Noël, Madame B. tombe malade, et Louis déménage chez son père, biologiste, à qui est conseillé de ne pas faire les devoirs avec son grand ado. Les contrôles de fin d’année sont mauvais, mais Louis a néanmoins son passage pour la quatrième. Louis s’intéresse au travail de son père, va le voir dans son laboratoire. L’échange père/fils se fait constructif. Et Louis commence à lire des revues à visée scientifique dont il ne comprend pas tous les articles. Il dit se sentir enfin dans sa peau. « Avant c’était pas moi ».Et avec des hauts et des bas, il poursuit sa scolarité, jusqu’à l’entrée au lycée, où il décolle. Louis a découvert la motivation et il a appris à travailler pour lui.

Douleur d'enseignant, douleurs d'enfants par M. J. Villaume

J’enseigne en classe de CM2 en ZEP, je suis maître formateur et militante aux CEMEA.
Je n’ai pas de cancre dans ma classe, que des élèves en souffrance affective ou éducative. Ils manquent cruellement d’adultes identificatoires. Leurs repères sont de bric et de broc…l’attention est globalement fugace, ils ont du mal à soutenir leur effort, mais quelle explosion de joie, quelle hystérie parfois, quand ils constatent qu’ils acceptent leur réussite. Nous manquons cruellement de thérapeutes pour nous aider à décrypter les blocages, à apaiser les douleurs, canaliser les débordements, les « trop pleins de manques ». Nous aurions aussi besoin de thérapeutes pour les maîtres, car combien est grande leur souffrance !
Pour moi, c’est douloureux de constater les dégâts chez les enfants, puis de voir les limites de mon action. Les élèves sont intelligents, vifs, mais leur disponibilité est fuyante… Je passe beaucoup de mon énergie à les apaiser, les rassurer sur leurs compétences…et beaucoup d’énergie aussi à les cadrer, à les ramener sur un terrain relationnel où leur colère doit s’exprimer mais surtout ne pas se retourner contre eux… Je travaille avec un thérapeute sophrologue qui entend ma propre douleur ; je me sens apaisée par ces séances, cela me permet de garder de la distance pour ne surtout pas être aspirée par le goufre des blessures des élèves.
M. J. Villaume

Eugène, de cancre à proviseur…

Un autre exemple de cancre qui, pour relever d’une logique différente, n’en est pas moins caractéristique du phénomène : E. Ducale, proviseur.

Primaire convenable et secondaire de misère avant d’être renvoyé du lycée à la fin de la classe de 4ème (à l’époque lycée), sans que je ne comprenne bien ce qui se passait. Je me suis aperçu bien plus tard que je m’y ennuyais profondément, je n’y faisais quasiment rien d’autre que rêver.

Mon père me place à l’usine avant 15 ans, deux années d’apprentissage  puis deux CAP.

Onze ans pendant lesquels je porte un intérêt important à la vie sociale.

A 26 ans concours de professeur technique (préparation personnelle et CNED). Reçu en excellente place. Second concours du même domaine à 38 ans et nouveau (brillant) succès. Sollicité, je candidate à 39 ans pour devenir proviseur de LP. Reçu et nommé. A 41 ans proviseur de lycée. A 53 ans proviseur de lycée de la catégorie la plus élevée et autres responsabilités de niveau académique en formation pour adultes. Reconnaissances et décorations institutionnelles…Toujours sans baccalauréat !!!

J’ai constamment eu une pratique professionnelle atypique (de plusieurs points de vue : regard sur l’élève, engagements pédagogiques personnels, sens de l’entreprise, du projet, de la dynamique…).

Un souci permanent m’a fait observer cet élève là… et pas sa classe (encore moins sa classe d’âge…)

Le milieu professionnel, le monde enseignant, (profondément fonctionnaire) me l’a fait payer chèrement en fin de carrière en raison du dérangement, souvent du malaise que j’ai créé, autour de moi, dans mon parcours en demeurant sensiblement différent (pas dans le moule !).

Je suis ainsi convaincu d’être ainsi resté le cancre de mon enfance !

Je reste profondément marqué par mon parcours (cancre -> proviseur) et quelque part (maintenant que j’ai quitté le milieu enseignant pour le monde économique et la création d’entreprise) assez fier (mais ça, je le garde pour moi).

Eugène Ducale