Conduire les élèves vers le savoir, qu’est-ce que cela signifie ? Les éveiller à leur manière d’apprendre ? Savoir leur montrer l’intérêt de ces connaissances pour leur existence ? Et d’ailleurs, que peut-on leur dire de l’utilité du savoir sans tomber dans un utilitarisme asséchant ?
Est bon prof celui qui conduit les élèves vers le savoir plutôt qu’il n’enseigne une matière.
Les élèves ont le désir d’apprendre, le désir de travailler quand ils perçoivent ce désir toujours existant chez les adultes, que ce soit leurs parents ou leurs profs.
Il y a bien entendu des méthodes à donner (comment mémoriser ou gérer le temps intelligemment ou encore parvenir à se concentrer au moment voulu) mais le goût de la curiosité ne peut s’enseigner(transmettre) que par l’exemple, et les élèves sentent d’instinct quand un prof est encore curieux de ce qu’il enseigne, quand il de la passion à le faire. Si celui-ci refait(reproduit) d’année en année le même cours, sans pratiquement en changer une ligne, il ne peut prétendre faire de ses élèves des êtres curieux non seulement de ce qui leur est enseigné, mais de ce qu’ils doivent découvrir par ailleurs, c’est-à-dire en dehors de l’école.
Imaginer que parler de l’utilité du savoir pour leur vie future peut les motiver dans l’apprentissage est tout à fait illusoire. Cela ne sert qu’à renforcer le crédo des bons élèves. Pour les autres, même s’ils sont conscients de la justesse de ce qui leur est prêché, il y a une distance, un fossé entre cette vérité et eux, leur désir, leur vie. Cela n’est d’aucune aide à les motiver.
–Pour ce qui est d’évaluer leur progression, quelle est votre position concernant le système de notation ? Quelle autre mode d’évaluation pourrait être mis en place ? Comment permettre à un enfant de s’auto-évaluer ?
Est bon prof celui qui connaît ses élèves et les juge non en fonction du niveau de la classe, mais en fonction de leur progression personnelle, de leurs difficultés, de leurs erreurs, de leurs réussites
Nous ne disons pas qu’il ne faut pas à un moment évaluer le niveau scolaire de l’enfant en fonction de celui des autres élèves, car il sera forcément confronté aux autres dans sa vie (examen, concours, et dans son parcours professionnel). De plus ne pas le préparer à cela pourrait le fragiliser. Mais le système de notation ne devrait pas être l’unique repère à l’évaluation de l’apprentissage.
L’enfant devrait être évalué en fonction de ses difficultés qu’il parvient à dépasser ou non, de ses facilités(qualités propres), de son travail, de ses progrès. Il est bon élève quand il parvient à vaincre un empêchement dans sa façon de travailler, quand il surmonte une difficulté, un obstacle. Il est un mauvais apprenant quand il ne corrige pas ses erreurs et refait le mêmes, devoir après devoir.
Est bon prof celui qui repère dans les copies des élèves les choses positives, des développements intéressants, une réflexion personnelle, un effort particulier, même si par ailleurs le devoir n’est pas très bon.
Quelles réussites gagnent à être saluées, au-delà de la simple exactitude des réponses ou de la seule adéquation à la consigne ? Je pense au domaine relationnel, à la persévérance, à l’autonomie..
Des réussites autres que la simple exactitude des réponses ou l’excellence d’un devoir devraient être valorisées, et cela dès le plus jeune âge, la persévérance, l’autonomie entre autres. Mais on ne peut espérer que les élèves soient persévérants si on ne leur donne pas très tôt le goût de l’effort. L’effort qui aboutit forcément au plaisir un jour ou l’autre. C’est l’investissement mis dans le travail qui doit être mis en lumière plus que le résultat de ce travail.
On ne peut désirer que les élèves soient autonomes si on n’accepte pas qu’ils cherchent le savoir par des voies de traverse, des voies qui leur sont propres, si on n’accepte pas qu’ils s’égarent en chemin et par la même qu’ils fassent des erreurs et qu’elles ne soient pas sanctionnées. Ces erreurs sont alors seulement interprétées et se révèlent souvent moteurs à réflexion.
A Sotto est plus expert que moi pour vous entretenir sur ses sujets de prédilection :
Le prof responsable de l’ambiance, de la coopération entre les élèves
Le sens de la communication avec les enfants et les parents (souvent des erreurs énormes de communication quand l’enseignant parle aux parents en présence de l’enfant)
La bonne connaissance de la dynamique des groupes pour installer le travail en sous-groupe
Varinia Oberto
Bonsoir,
Je viens de découvrir le site et il m’interpelle. Mère de de deux jeunes adultes et de deux adolescents, j’ai repris le travail en retournant dans l’enseignement.
Je suis actuellement professeur en collège et j’aime ça.
Enfant et adolescente, je faisais partie des cancres de la première catégorie. Inattentive, sauf si le cours m’intéressait, mais curieuse de tout à l’extérieur. A la fin de ma seconde, catastrophique, et comme j’avais déjà redoublé ma cinquième, mes parents ont refusé que je redouble la seconde et m’ont inscrite dans un lycée hors contrat, spécialiste des réfractaires dans mon genre.
J’ai repris confiance en moi et surtout j’ai compris que je savais énormément de choses, que j’avais une excellente mémoire et que je devais oser m’affirmer.
De retour dans le circuit classique, je me suis heurtée à certains enseignants, ceux qui ne devraient pas ou plus enseigner, mais j’ai tenu bon et eu mon bac avec mention. Puis en fac rebelote, alors j’ai travaillé en même temps.
Puis je me suis mariée, j’ai eu des enfants et la vie m’a joué un sacré tour. Tous mes enfants ont rencontré des difficultés : précocité, autisme léger, incapacité à décoder le langage non verbal, dysgraphie, compréhension intuitive etc etc
Il m’a fallu batailler contre le système et me faire aider des enseignants qui voulaient bien prendre mes gosses comme ils étaient.
Mais au final, à mon tour dans le circuit, j’essaie par tous les moyens de ne pas être ce prof qui ne sert à rien. Ma motivation ? Qu’à 70 ans, ces élèves que j’aurais eu, aient encore l’envie de savoir de nouvelles choses, qu’ils soient toujours curieux. Je sais parfaitement qu’ils n’auront pas retenu la totalité des cours, cependant si j’ai réussi à leur faire comprendre ne serait ce qu’une notion, à leur faire aimer un personnage de la littérature, à retrouver juste le goût de lire, alors j’aurais apporter ma pierre à l’édifice. Et tant pis si le programme n’est pas complètement terminé.
D’ailleurs il est parfois totalement abscons, alors je bricole. Je reprends la notion à l’ancienne, je travaille sur le visuel ou l’auditif selon les élèves, je tente une approche autre que celle voulue par les théoriciens de la pédagogie. Ceux qui n’ont jamais mis le pied dans une classe…
J’ai eu beaucoup de mauvais enseignants, quelques bons voire très bons. Mes enfants aussi et c’est à ces derniers que je pense en accomplissant mon boulot.
Et votre site m’apporte de nouvelles connaissances et pleins d’idées à mettre en oeuvre pour l’année scolaire à venir.
Merci.